Toutes les disciplines artistiques portent en elles l’autodidacte (l’acte auto dicté).
Mon art premier est la musique. Musique en général, jazz en particulier. J’ai vécu avec elle une grande partie de ma vie. Ma mère, chanteuse lyrique, m’a fait entendre, et cela bien avant ma naissance même, les grands airs des opéras qu’elle travaillait, s’accompagnant d’un doigt sur le piano d’étude qui trônait dans notre petite salle à manger. Dans ma piscine amniotique, j’entendais déjà des sons, avec les émotions qui vont avec. De cela il me viendra toujours le goût de la mélodie, qui restera mon guide toute ma vie de musicien.
Le bois… L’odeur du bois… Les couleurs du bois… la chaleur du bois… Le toucher du bois, si sensible, si proche du toucher du piano… La fragilité du bois… Le cutter et le scalpel sont comme un prolongement des doigts, comme le crayon pour le dessinateur et le pinceau pour le peintre.
J’ai cultivé cet amour-là d’abord très secrètement en découpant des morceaux de placage, en les triturant, les cassant, les collants sur des supports improbables… L’art de la marqueterie s’apprend, comme tous les arts, mais je décidai de me débrouiller seul, avec pour seuls outils une paire de ciseaux et un cutter, le livre de P. Ramond et une admiration sans bornes pour les ébénistes et marqueteurs de l’histoire des objets et du meuble. Mais l’essentiel de mon temps était occupé par la création musicale et je ne pouvais plus continuer mes brouillons de découpage de placage sur un coin de table.
Puis, l’âge venant, avec le peu d’expérience acquise, je décidai de me consacrer à cet art millénaire, de me frotter à ce que signifie la conception graphique. J’étais fasciné par les illusions et les formes impossibles de M.C.Escher, et il m’est apparu comme une évidence, de reproduire en marqueterie des dessins du maître graveur néerlandais… Puis d’aller plus loin, d’inventer des formes, d’essayer des cohabitations de formes différentes voir opposées, le circulaire et l’anguleux par exemple, tout en laissant la matière libre de me proposer les couleurs, les lignes, les courbes, les points que le bois possède naturellement. Puis vint l’idée du support éclaté, qui, de mon point de vue, apporte à l’œil une façon d’observer l’œuvre de façon différente. La découpe de l’enveloppe devient partie prenante du dessin. Le support a son mot à dire quant à la conception globale.
Aujourd’hui j’en suis là… Demain je ne sais pas… Mais la lumière du bois sera j’en suis sûr longtemps mon guide pour de nouvelles découvertes, nouvelles façons de regarder le monde… Les mondes…
Joël Drouin
Bois utilisés dans mes panneaux de marqueterie
Satiné red gum
Tulipier (teinté noir)
Marronnier (clair et légèrement strié)
Tinéo (marron strié clair et foncé)
Tinéo du Chili (rouge strié foncé)
Peuplier (blanc)
Loupe de Peuplier (très clair légèrement ondé avec des points bruns)
Avodiré (blanc)
Sycomore (blanc)
Bouleau madré (pointillé et un peu moucheté)
Bocote (très strié foncé)
Erable moucheté
Erable ondé
Erable pommelé
Frêne (strié et ondulant)
Frêne du Japon (très pommelé)
Frêne olivier
Loupe de frêne
Orme
Olivier
Loupe de Camphrier (clair ou foncé)
Loupe de Madrona (marron clair)
Loupe de Séquoïa
Loupe d’érable (clair et stries en vagues)
Loupe de myrte
Ayous
Koto bleuté
Chêne
Chêne des marais